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Pour les bailleurs et les preneurs en région Wallonne: la règle "illogique" concernant la durée restante des baux a ferme en cours a été déclarée inconstitutionnelle

Publié le 10/05/2023

Avec l'introduction au 1er janvier 2020 des nouvelles règles du décret wallon sur le bail à ferme, notamment sur la durée des contrats, le législateur wallon n'a curieusement pas élaboré de mesures transitoires pour les baux écrits en cours. À la demande de deux Juges de paix, la Cour constitutionnelle a examiné la différence de traitement entre les contrats écrits et oraux et a jugé que l’absence de mesures transitoires était inconstitutionnelle.


Principe: limitation à trois renouvellements de 9 ans

Avant l'entrée en vigueur du décret du 2 mai 2019 « modifiant diverses législations en matière de bail à ferme », le nombre de renouvellements possibles du bail à ferme n'était pas limité.
Le législateur wallon a voulu mieux protéger les intérêts du bailleur et a donc introduit plusieurs nouvelles règles pour ajuster l'équilibre entre le preneur et le bailleur.

En vertu des nouvelles règles, un bail classique de 9 ans pourra être prolongé au maximum 3 fois et aura donc une durée maximale de 36 ans. Après cette troisième prolongation, le bail prendra fin de plein droit.
Il s'agit d'un des plus grands, pour ne pas dire le plus grand changement dans le décret wallon sur du 2 mai 2019.

Cependant, le décret mentionné ci-dessus n'est pas applicable en Flandre. De plus, et un tel changement est non plus prévu dans le futur nouveau décret flamand sur les baux à ferme.

Mesures transitoires pour les anciens baux (oraux) datant d'avant le 1er janvier 2020

La Région wallonne reconnait l'importance de prévoir des mesures transitoires pour les baux à ferme en cours. Curieusement, le législateur n'a élaboré des mesures que pour les baux verbaux en cours et non pour les baux écrits.

Pour les baux verbaux en cours, le décret stipule que les parties disposent de 5 ans à compter du 1er janvier 2020 pour rédiger un accord écrit. En l'absence d'un tel accord, le bail en cours (oral) est supposé commencer la troisième période de neuf ans le 1er janvier 2020. Cela correspond à une deuxième prolongation de 9 ans et signifie que le contrat peut continuer jusqu'en 2038 au maximum (3e + 4e période de 9 ans = 18 ans).

En outre, le preneur peut renverser cette présomption s'il apporte la preuve que l'accord verbal a été conclu après le 1er janvier 2002.

Quid des "anciens" baux écrits en cours?

De nombreux preneurs ont été confrontés à une nouvelle législation qui a pris effet immédiatement sur les nouveaux et les anciens contrats. Ils ont constaté la durée de leur contrat avait expiré!
En raison de l'entrée en vigueur immédiate du décret du 2 mai 2019, dans le cas d'un bail écrit - qui était déjà en vigueur depuis 36 ans à la date d'entrée en vigueur du décret (1er janvier 2020) - le bailleur peut immédiatement envoyer un avis de résiliation à son locataire. En effet, le bail prend fin de plein droit après 3 renouvellements!
Or, dans le cas de contrats en cours depuis 1985, par exemple, le bail prendrait bientôt fin de plein droit.

Par conséquent, il existe une énorme différence de traitement entre les baux écrits et les baux verbaux.
La sécurité juridique a également été complètement bouleversée.
C'est encore plus surprenant, vu que le nouveau décret met l'accent sur les "contrats écrits obligatoires". En d'autres termes, ceux qui ont fait de leur mieux pour rédiger un contrat écrit dans le passé constateront dans la plupart de ces cas que la durée du bail à ferme a été considérablement réduit ou que le bailleur peut mettre fin à l'accord. Par comparaison les titulaires d'un bail verbal disposent, de toute façon (au pire), encore d'une garantie de 18 ans jusqu'en 2038...
C'est le monde à l'envers.

Arrêt de la Cour constitutionnelle du 2 mars 2023

Deux procédures ont été entamés devant deux Juges de paix concernant la résiliation de baux écrits en cours depuis plus de 36 ans, en raison de la modification des règles relatives à la durée des baux.

La Cour constitutionnelle a jugé que l'absence de mesures transitoires concernant les baux écrits en cours porte une atteinte disproportionnée aux attentes légitimes des preneurs de baux écrits en cours dont le contrat a déjà une durée de 36 ans le 1er janvier 2020.
L'application immédiate des nouvelles règles modifie considérablement l'équilibre contractuel.

La Cour a ensuite jugé que le législateur wallon doit avoir développé un régime transitoire pour les contrats écrits au plus tard le 31 décembre 2023.

Conclusion

Le législateur wallon devra développer un régime transitoire au plus tard le 31 décembre 2023. Dans l'attente de l'élaboration d'un régime, les mesures transitoires pour les contrats verbaux sont pour l'instant également applicables aux contrats écrits en cours.
Ainsi, la grande incertitude qui régnait en ce qui concerne les baux écrits en cours est levée.
La question se pose à nouveau de savoir comment il est possible que le législateur ait pu négliger une telle chose... il était évident que rien n'avait été prévu pour les contrats écrits en cours...